Poésie astrale

Langage des astres, une source d'inspiration poétique

Charles Baudelaire - (1829-1867)

Le coucher du soleil romantique

Que le Soleil est beau quand tout frais il se lève,
Comme une explosion nous lançant son bonjour !
Bienheureux celui-là qui peut avec amour
Saluer son coucher plus glorieux qu'un rêve !
Je me souviens !...J'ai vu tout, fleur, source, sillon
Se pâmer sous son œil comme un cœur qui palpite.
Courons vers l'horizon, il est tard, courons vite
Pour attraper au moins un oblique rayon !

Léon-Pamphile Le May - (1837-1918)

Les astres

Mondes qui, chaque soir, à mes regards ravis
Publiez la grandeur du Créateur suprême,
Passez-vous les premiers dans un lointain extrême,
Ou d'autres sont-ils morts, que vous avez suivis ?
A d'implacables lois êtes-vous asservis ?
La route parcourue est-elle encor la même ?
Et, comme les fleurons autour d'un diadème,
Rayonnez-vous autour des célestes parvis ?
Est-il parfois chez vous un coeur qui s'apitoie ?
Est-il un gueux qui pleure, un riche qui festoie ?
O mondes éclatants, vos sentiers sont-ils vieux ?
Nous cherchez-vous aussi dans votre impatience ?
Direz-vous vos secrets, un jour, à la science,
Ou faudra-t-il mourir pour vous connaître mieux ?

Alfred de Musset - (1810-1857)

Ballade à la Lune

C'était, dans la nuit brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

Lune, quel esprit sombre
Promène au bout d'un fil,
Dans l'ombre,
Ta face et ton profil ?

Es-tu l'œil du ciel borgne ?
Quel chérubin cafard
Nous lorgne
Sous ton masque blafard ?

N'es-tu rien qu'une boule,
Qu'un grand faucheux bien gras
Qui roule
Sans pattes et sans bras ?

Es-tu, je t'en soupçonne,
Le vieux cadran de fer
Qui sonne
L'heure aux damnés d'enfer ?

Sur ton front qui voyage,
Ce soir ont-ils compté
Quel âge
A leur éternité ?

Est-ce un ver qui te ronge
Quand ton disque noirci
S'allonge
En croissant rétréci ?

Qui t'avait éborgnée,
L'autre nuit ? T'étais-tu
Cognée
A quelque arbre pointu ?

Car tu vins, pâle et morne,
Coller sur mes carreaux
Ta corne
A travers les barreaux.

Va, lune moribonde,
Le beau corps de Phébé
La blonde
Dans la mer est tombé.

Tu n'en es que la face
Et déjà, tout ridé,
S'efface
Ton front dépossédé…

Lune, en notre mémoire,
De tes belles amours
L'histoire
T'embellira toujours

Et toujours rajeunie,
Tu seras du passant
Bénie,
Pleine lune ou croissant.

T'aimera le pilote,
Dans son grand bâtiment
Qui flotte
Sous le clair firmament.

Et la fillette preste
Qui passe le buisson,
Pied leste,
En chantant sa chanson…

Et qu'il vente ou qu'il neige,
Moi-même, chaque soir,
Que fais-je
Venant ici m'asseoir ?

Je viens voir à la brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

Victor Hugo - (1802 - 1885) 

recueil : Les Chansons Des Rues Et Des Bois (1865)

Les étoiles filantes

À qui donc le grand ciel sombre
Jette-t-il ses astres d'or ?
Pluie éclatante de l'ombre,
Ils tombent...? — Encor ! encor !

Encor ! — lueurs éloignées,
Feux purs, pâles orients,
Ils scintillent... — ô poignées
De diamant effrayant !

C'est de la splendeur qui rôde,
Ce sont des points univers,
La foudre dans l'émeraude !
Des bleuets dans des éclairs !

Réalités et chimères
Traversant nos soirs d'été !
Escarboucles éphémères
De l'obscure éternité !

De quelle main sortent-elles ?
Cieux, à qui donc jette-t-on
Ces tourbillons d'étincelles ?
Est-ce à l'âme de Platon ?

Est-ce à l'esprit de Virgile ?
Est-ce aux monts ? Est-ce au flot vert ?
Est-ce à l'immense évangile
Que Jésus-Christ tient ouvert ?

Est-ce à la tiare énorme
De quelque Moïse enfant
Dont l'âme a déjà la forme
Du firmament triomphant ?

Ces feux-là vont-ils aux prières ?
À qui l'Inconnu profond
Ajoute-t-il ces lumières,
Vagues flammes de son front ?

Est-ce, dans l'azur superbe,
Aux religions que Dieu,
Pour accentuer son verbe,
Jette ces langues de feu ?

Est-ce au-dessus de la Bible
Que flamboie, éclate et luit
L'éparpillement terrible
Du sombre écrin de la nuit ?

Nos questions en vain pressent
Le ciel, fatal ou béni.
Qui peut dire à qui s'adressent
Ces envois de l'infini ?

Qu'est-ce que c'est que ces chutes
D'éclairs au ciel arrachés ?
Mystère ! Sont-ce des luttes ?
Sont-ce des hymens ? Cherchez.

Sont-ce les anges du soufre ?
Voyons-nous quelque essaim bleu
D'argyraspides du gouffre
Fuir sur des chevaux de feu ?

Est-ce le Dieu des désastres,
Le Sabaoth irrité,
Qui lapide avec des astres
Quelque soleil révolté ?


Saint Nersès Snorhali - (1102-1173), Le ciel et ses splendeurs

Le Soleil

Je possède une escarboucle resplendissante,
Placée sur la poitrine, à l'instar de l'éphod d'Aharon.

Tel un époux il est désirable par l'ardeur de l'amour:
Il ouvre ses bras à l'humidité de son épouse.

La Lune

Mais pour la nuit, j'ai celle qui brille blanchâtre, pareille au cristal,
Qui toujours croît et décroît tous les quinze jours.

Elle mesure le nombre de la durée des jours des hommes,
Ce que chante aussi la lyre à dix cordes de David.

Elle favorise la passion de l'humidité et de la matière;
Elle les unit en un mariage brûlant.

De leur union intime naissent tous les êtres:
Végétaux, plantes et êtres sensibles qui respirent.

Les planètes

En vérité, en moi se trouvent sept veilleuses allumées:
Errantes, elles donnent un signe infaillible aux hommes.

Elles possèdent en elles le nombre des jours de la création
Et le mystère des sept périodes de l'achèvement.

Les douze signes du zodiaque

Il se trouve aussi en moi une ville glorieuse en rotonde,
Flanquée de douze tours en forme de vivant.

Ces tours sont les stations de mes sept planètes;
En y entrant celles-ci influent à l'avance sur l'avenir.

A propos de certaines d'entre elles, les connaisseurs disent et promettent que ce sera bien;
Pour d'autres, ils disent que ce sera mal.

Il arrive que ce qu'ils ont dit se réalise et s'accomplit;
Il arrive aussi que leurs pronostics s'avèrent faux et vains.

Et pour ce fait, il y a une raison très mystérieuse;
Ce que nous dirons brièvement à l'oreille qui entend.

Bien qu'elles soient sans vie et privées de raison,
Cependant par leur mouvement particulier elles ont une signification.

Ce n'est pas par leur sens qu'elles produisent ce qui est utile,
Mais par la Parole avec laquelle fut créé le ciel.

Alphonse de Lamartine - Méditations poétiques, 1823

Les étoiles

Il est pour la pensée une heure... une heure sainte,
Alors que, s'enfuyant de la céleste enceinte,
De l'absence du jour pour consoler les cieux,
Le crépuscule aux monts prolonge ses adieux.
On voit à l'horizon sa lueur incertaine,
Comme les bords flottants d'une robe qui traîne,
Balayer lentement le firmament obscur,
Où les astres ternis revivent dans l'azur.
Alors ces globes d'or, ces îles de lumière,
Que cherche par instinct la rêveuse paupière
Jaillissent par milliers de l'ombre qui s'enfuit
Comme une poudre d'or sur les pas de la nuit ;
Et le souffle du soir qui vole sur sa trace,
Les sème en tourbillons dans le brillant espace.
L'œil ébloui les cherche et les perd à la fois ;
Les uns semblent planer sur les cimes des bois,
Tel qu'un céleste oiseau dont les rapides ailes
Font jaillir en s'ouvrant des gerbes d'étincelles.
D'autres en flots brillants s'étendent dans les airs,
Comme un rocher blanchi de l'écume des mers ;
Ceux-là, comme un coursier volant dans la carrière,
Déroulent à longs plis leur flottante crinière;
Ceux-ci, sur l'horizon se penchant à demi,
Semblent des yeux ouverts sur le monde endormi,
Tandis qu'aux bords du ciel de légères étoiles
Voguent dans cet azur comme de blanches voiles
Qui, revenant au port, d'un rivage lointain,
Brillent sur l'Océan aux rayons du matin.


Allégorie du zodiaque - Martin Schulman

C'était le matin. Dieu se tenait devant ses douze enfants et il planta en chacun d'eux une semence de vie humaine. Ils se présentèrent à lui un par un pour recevoir les dons qui leur étaient respectivement assignés.

« A toi, Bélier, Je donne ma semence le premier jour, pour que tu aies l'honneur de la mettre en terre. Chaque graine plantée te permettra de récolter un million d'autres graines. Tu seras le premier à pénétrer sur le sol de l'esprit humain avec Mon Idée. Mais ce n'est pas ton affaire d'entretenir cette idée, ni de t'interroger à son propos. Ta vie est dans l'action et la seule tâche qui t'incombe est de commencer à rendre les hommes conscients de Ma Création. Pour la bonne marche de ton travail , je te donne la vertu de l'Estime de Soi ».
Tranquillement, le Bélier retourna à sa place.

« A toi, Taureau, Je donne le pouvoir de rendre la semence substantielle. Ton travail est de la plus haute importance, il demande toute ta patience, car tu dois achever tout ce qui a été entrepris, au risque de voir les graines emportées par le vent. Tu ne dois ni douter, ni changer d'idée en cours de route, non plus que dépendre des autres dans le travail que Je t'ai destiné. Pour cela, Je te fais don de la Force. Uses-en avec sagesse ».
Et le Taureau retourna à sa place.

« A toi, Gémeaux, Je donne les questions sans réponses de façon à ce que tu puisses donner à tous les hommes la compréhension de ce qu'ils vivent autour d'eux. Tu ne sauras jamais pourquoi ils parlent et écoutent, mais dans ta quête de la réponse tu trouveras mon cadeau : la Connaissance ».
Et le Gémeaux retourna à sa place.

« A toi, Cancer, Je donne la tâche d'enseigner l'émotion aux hommes. Mon Idée est de provoquer leurs rires et leurs larmes, pour que ce qu'ils vivent et pensent crée la plénitude au-dedans d'eux. Pour cela, Je te fais don de la Famille, afin que ta plénitude puisse la rendre prospère ».
Et le Cancer retourna à sa place.

« A toi, Lion, Je donne la tâche d'étaler aux yeux du monde Ma Création dans tout son éclat. Mais tu dois te méfier de la fierté et toujours te souvenir qu'il s'agit de Ma Création, et non de la tienne. Si tu l'oublies, les hommes te mépriseront. Tu trouveras de grandes joies dans le travail que Je te donne si tu l'accomplis parfaitement. Pour cela, tu dois avoir le don de l'Honneur ».
Et le Lion retourna à sa place.

A toi, Vierge, Je te demande de juger de ce que l'homme a fait de Ma Création. Tu dois examiner son comportement avec attention et lui rappeler ses erreurs de façon à ce qu'à travers toi, Ma Création soit accomplie. Pour cela, Je te donne la Pureté de l'Esprit ».
Et la Vierge retourna à sa place.

« A toi, Balance, Je donne la mission de servir, pour que l'homme puisse être attentif à ses devoirs envers les autres. Il doit apprendre la coopération autant que la capacité de réfléchir à l'autre face de ses actes. Je te mettrai partout où règne la discorde et pour tes efforts, Je te fais don de l'Amour ».
Et la Balance retourna à sa place.

« A toi, Scorpion, Je donne une tâche très difficile. Tu auras la capacité de connaître l'âme des hommes, mais Je ne te permets pas de parler de ce que tu apprends. Tu seras souvent attristé de voir les choses telles qu'elles sont, cela te détournera de Moi et te fera oublier que ce n'est pas Moi, mais la perversion de Mon Idée, qui cause ta douleur. Tu verras si bien l'homme que tu finiras par le voir comme un animal et tu lutteras tant au fond de toi contre ses instincts que tu perdras ton chemin, mais lorsque tu reviendras vers Moi, Scorpion, J'ai pour toi le don suprême de la Détermination ».
Et le Scorpion s'en retourna.

« Sagittaire, Je te demande de faire rire les hommes, car leur incompréhension de Mon Idée les rend amers. A travers leurs rires, tu dois leur donner l'espoir qui les ramènera vers Moi. Tu toucheras ainsi de nombreuses vies, mais seulement pour un temps, et connaîtras chaque fois l'inquiétude. A toi, Sagittaire, Je fais don de l'Abondance Infinie que tu pourras répandre jusqu'à atteindre chaque coin sombre et y apporter la lumière ».
Et le Sagittaire retourna à sa place.

« De toi, Capricorne, J'attends le labeur de ton front, pour que tu puisses enseigner le travail aux hommes. La tâche n'est pas facile, car tu ressentiras les travaux de l'homme peser sur tes épaules. Mais pour la contrainte de tes fardeaux, Je mets la Responsabilité de l'homme entre tes mains ».
Et le Capricorne retourna à sa place.

« A toi, Verseau, Je donne la conception du futur, pour que l'homme puisse dépasser ses limites. Tu connaîtras la douleur de la solitude, car Je ne t'autorise pas à personnaliser Mon Amour. Mais, pour ouvrir les yeux de l'homme à d'autres possibilités, Je te fais don de la Liberté ; elle te permettra de continuer à servir l'humanité lorsque cela est nécessaire ».
Et le Verseau retourna à sa place.

« A toi, Poissons, Je donne la tâche la plus difficile de toutes. Je te demande de prendre sur toi toutes les misères de l'homme et de me les retourner. Tes larmes doivent devenir les Miennes. La tristesse que tu absorbes représente l'effet de l'incompréhension de Mon Idée par l'homme, mais tu dois lui apporter la compassion pour qu'il essaie à nouveau. Pour cette tâche si difficile, Je te fais le don le plus merveilleux de tous. Tu seras le seul de mes douze enfants à Me comprendre. Mais ce don de compréhension n'est réservé qu'à toi seul, Poissons, car si tu essaies de la communiquer à l'homme, il ne voudra pas t'écouter ».
Et le Poisson retourna à sa place.

Alors Dieu dit : « Chacun d'entre vous possède une partie de Mon Idée. Vous ne devez pas commettre d'erreur dans leur interprétation, ni désirer négocier ces parties entre elles. Chacun de vous est parfait, mais vous ne le saurez que lorsque vous serez Un. Alors toute Mon Idée sera révélée à chacun d'entre vous ».
Une fois seul, chaque enfant décida de faire de son mieux avec le don reçu. Mais aucun ne comprit complètement sa tâche ou son don, et quand ils retournèrent vers Dieu, très embarrassés, il dit : « Vous croyez tous que le don des autres est meilleur que le vôtre. Je vous permettrai donc de les échanger ». Et chaque enfant connut l'extase pendant un instant, en considérant toutes les possibilités de sa nouvelle mission. Mais Dieu sourit et dit : « Vous Me reviendrez plusieurs fois pour Me demander d'être délivrés de votre mission et chaque fois Je devrai accéder à votre désir. Vous traverserez un grand nombre d'incarnations avant d'achever la mission initiale que J'ai prescrite à chacun. Je vous donne un temps infini pour y arriver, mais vous ne pourrez être avec Moi qu'une fois que cela sera fait ».